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FRED PELLERIN



Fier ambassadeur des lutins
et autres extraoridinairités
de Saint-Élie-de-Caxton
Mauricie, Québec, Canada

 
 

UN ARTICLE ÉCRIT À L'ORIGINE POUR UN MAGAZINE MONTRÉALAIS. NOUS INAUGURONS CE MOIS-CI LA ROUTE 138 À L'EST DE MONTRÉAL AVEC CET HOMMAGE À FRED PELLERIN ET AUX GENS DE LA MAURICIE.

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St-Élie
de Caxton

À la recherche
de Fred Pellerin

thibauddecorta@marthiii.com
TEXTE ET ILLUSTRATIONS: THIBAUD DE CORTA
PHOTOS : VILLE DE SAINT-ÉLIE DE CAXTON


CITATION DU MOIS :
Tous les pays du monde qui n'ont plus de légendes seront condamnés à mourir de froid. [ Patrice de La Tour du Pin ]


 

Il fut un temps ou parcourant les routes du Québec, au gré de saisons, je constatais la richesse des lieux visités. Qu’il s’agisse de Havre St-Pierre, Baie St- Paul, Rouyn, St-Jacques le Majeur, Dolbeau, chaque endroit recelait au moins une histoire, un conte, un secret, dominant les évènements banals qui ponctuent la vie d’une communauté. J’avais comme idée de glaner çà et là ces histoires pour en faire un recueil. Vaste et ambitieux (et peut-être un peu prétentieux) projet dont je ne réalisais pas toute l’implication que ça supposait. Et puis, je réalisai que ce mouvement non seulement existait, mais encore, qu’il explosait littéralement.

Je mets dans un même « cadre », Michel Faubert, Mononc’Serge, Fred Fortin, Pierre Lapointe et Fred Pellerin (pour ne nommer que ceux là).


Mis à part Michel Faubert ( plus « racines » ) tous se projettent dans un personnage qui n’est pas exactement eux-mêmes. Si on ne connaît Mononc’Serge que par la musique, par exemple, on risque d’être décontenancé quand on rencontre la personne cultivée, posée, à la limite de l’innocence qu’il est dans la vie de tous les jours. Aussi, Pierre Lapointe parle volontiers du personnage qu’il interprète et de son évolution.


Pour Fred Pellerin, il se passe quelque chose de plus indéfinissable dans le rapport « auteur-personnage ». Pour essayer de comprendre, je suis donc parti à sa recherche dans une enquête qui dura huit jours. Mais est-ce bien à sa recherche que je suis parti, ou à la rencontre de mon souvenir de lui? Et... Était-ce bien huit jours, huit semaines ou huit mois?


PHOTOS : VILLE DE SAINT-ÉLIE DE CAXTON

Jour un

Martine m’appelle :

- Une amie se marie en fin de semaine et ça se passe à la Pierre angulaire! Un restau en Mauricie, pas loin d’un village... « St-Élie de Machin », je crois.


Evidemment, ça et la page d’accueil Google en chinois, c’est kif-kif pour moi à ce stade. J’ai plus ou moins enregistré ou on allait, faisant confiance aux évènements et donc je me rends là bas tout guilleret à l’idée d’un mariage qui, somme toute, est un évènement heureux, inconscient d’être au premier jour de mon enquête.


PHOTOS : VILLE DE SAINT-ÉLIE DE CAXTON


Jour deux

Déjà, la notion du temps commence à déraper. Il y avait bien un mariage, super, avec ambiance totale. Il faut dire que la Pierre angulaire était un endroit peu banal...

La nature y fait carrément intrusion, s’invitant en la personne (si on peut dire) d’un énorme rocher, d’où le nom de l’établissement. Je me souviens, mais c’est plus vague, de quelqu’un qui parlait au micro. Mais, comment dire, je ne me souviens que de la magie du moment...

Une ambiance de déconnade sérieuse.

Un récit entre la prose et le conte.

Organique, c’est le mot qui revient.

Rayonnant.

Et de quoi parle Fred Pellerin? De toute sortes de choses, de son village natal, de Esimésac Gelinas, l’homme fort du village, de sa tante, de l’éleveur de mouche et de bière de bibittes et autres personnages, bref d’un microcosme bien défini. D’ailleurs, Pellerin dévoile d’entrée de jeux sa proposition (dans son livre «comme une odeur de muscles ») en citant Archimède : « Donnez moi un point d’appui et je soulèverais le monde. ».

Fred Pellerin pourrait n’être qu’un fils de comptable doué pour le conte ( et s’amuser du jeux de mots ), il est plutôt un fin narrateur de l’humanité qui a compris que l’humain se regarde de l’intérieur. La modestie et l’humilité du cadre lui permettent d’appliquer une pensée profonde et généreuse. Fred Pellerin aime inconditionnellement son univers et dévoile notre nature au travers d’un lieu, ni ancien ni moderne, tout simplement encré dans un maintenant à la limite de l’univers clos.

Ce qui pourrait sembler une limite devient le révélateur d’un monde.


PHOTOS : VILLE DE SAINT-ÉLIE DE CAXTON

Jour trois :

de la bande dessinée.


Quand on parle de Fred Pellerin, certains l’associent à l’univers de la bande dessinée. Bien que je sois méfiant face à cette comparaison, la bande dessinée au Québec étant culturellement associée aux enfants, il est vrai qu’il y a des similitudes frappantes. Au niveau du langage d’abord, alors que Pellerin se permet de déformer juste assez la langue pour qu’elle reste claire tout en étant très vivante, comme Ségar, l’auteur original de Popeye, l’a fait, ou encore Will Eisner avec « The Spirit », bande dessinée policière ou le langage devient à la limite du phonétique, décrivant bien le milieu qu’il dépeint. Car il s’agit bien de ça. Rendre compte d’une réalité et de ses codes, si « primitifs » soient-ils. En ce sens, la bande dessinée, à cause de son aspect populaire, se donne le droit d’avoir un langage non académique pour rendre compte plus précisément d’un univers. Ce que fait Pellerin.


PHOTOS : VILLE DE SAINT-ÉLIE DE CAXTON

Jour quatre :

de la culture.


S’il n’y avait que cette influence, ça serait déjà pas mal. Mais en plus d’être un
« Gossinny » du conte, notre conteur va puiser dans d’autres formes littéraires. Histoire d’avoir plusieurs points de vue de la scène.


Et curieusement, bien qu’il y ait du vocabulaire « anglais » et un air d’aller très américain, cette langue est ce qu’il y a de plus française. En fait on pourrait même dire que cette langue est l’avenir du français, tant elle s’exprime sans complexe, avec fluidité, empruntant de-ci- delà sans jamais perdre son identité. L’académisme n’est pas un dictat, mais plutôt un repère sur le quel Pellerin surfe allègrement. À le lire et l’écouter, on ne sent pas une revendication culturelle mais plutôt une fascination universelle au travers de l’anecdotique. La langue devient vecteur et non fin. C’est un témoignage touchant, en mouvement, qui dépasse les frontières, et qui est en même temps le miroir de nos émotions à peine travesties.


Jour cinq :

premier bilan.


Donc, comment rencontrer Fred Pellerin? Par une amie commune, j’obtiens son adresse de courriel et part à la pêche. Il me répond, quelque temps (ou était-ce quelques heures?) plus tard :


« Te dire que j'avais bien reçu ton courriel,
Mais que j'attendais mon meeting avec agentes, (…)
(…) Finalement, voilà.
Le vent dépasse mes voiles,
Alors je devrai me retenir pour le moment.
Non pas que l'idée ne m'allume rien
en couleurs internes,
Mais j'ai le 2006 plein,
Quelques dates encore libre en 2007
(11 seulement)
Un immense projet d'écriture sur lequel je devrai plancher sur un an minimum
Et surtout un petite famille neuve,
Une fille dans les rangs,
Avec 6 mois et deux dents. »


Alors bien sur, je me suis tenu cois en me disant qu’il me restait trois jours d’enquête (ou était-ce trois mois?)


PHOTOS : VILLE DE SAINT-ÉLIE DE CAXTON


Jour six :

de l’Amérique


Voilà un terre qui a accueilli pas mal de monde. Parmi ceux là, des français et des anglais et leur culture qui forcement s’est transformée. Au Québec, non seulement avons-nous préservé notre langue, mais encore avons-nous la prétention de la réinventer. Les américains l’ont bien fait avec l’anglais et si on peut penser que la langue s’est appauvrie par rapport à la langue d’origine on se trompe en ce sens qu’elle a évolué pour s’adapter à une nouvelle réalité et la nommer, ce que ne pouvait faire l’empire.


Avec Pellerin, on sent cette identité américaine qui assume pleinement son état face à la culture du vieux continent. Pas de honte, pas de comparaison, son univers se tient et donne envie de regarder à l’intérieur. Et en français. Et comme toujours, un français qui flirte avec l’anglais. Mais ne sont- ce pas là deux langues sœurs qui se narguent et qui s’en amusent?


PHOTOS : VILLE DE SAINT-ÉLIE DE CAXTON


Jour sept :

du Québec


Ce qui est reposant chez Fred Pellerin, c’est l’oasis qu’il nous offre au travers de notre course identitaire contre la montre. Il prouve qu’une langue assumée s’énonce clairement dans sa cohérence en n’essayant pas d’être « moderne » . Ce qui nous fait revenir sur notre vision de l’art oral africain, par exemple qui bien qu’il semble archaïque n’en est pas moins parvenu à nos oreilles, s’actualisant du coup. Ce qui donne envie de s’ouvrir et de savoir. En ce sens, Fred Pellerin est un ambassadeur du Québec d’aujourd’hui et de sa vivacité.


PHOTOS : VILLE DE SAINT-ÉLIE DE CAXTON


Jour huit :

de l’infini comme mesure d’arpentage


Au travers de tout ça, nous avons été tentés de retourner sur les lieux de la première vision. Nous nous sommes perdus, quelque part en Mauricie, juste assez pour que je réalise qu’en fait, j’avais rencontré Fred Pellerin au travers de son univers ( ses courriels m’ont convaincu par la cohérence de la personne derrière le personnage) et qu’aller plus loin n’était qu’un désir narcissique inutile. Je savais déjà l’essentiel : Sa générosité, son amour des gens, son humour décapant, son humilité et son coté « petit cousin qu’on a, ou qu’on a tous voulu avoir », inspire un respect, une distance, comme s’il y avait un nuage flou autours de Ste- Élie de Caxton . Nuage entretenu pour inspirer l’effort de découverte. Laissons Fred Pellerin conclure : »

 

 

Voilà. Une bribe des histoires tirées du village de Ste Élie de Caxton.

Une bribe, juste pour se donner un idée du total. Complètement extrapolant. Assez pour tracer un monde cartographique parallèle des continents internes du merveilleux. C’est un fragment de légende, comme il en est dans chaque racoin de la carte. Comme on en trouve dans tous les villages qui se meurent de se voir disparaître. De la mappe et de la réalité. Avec l’exode massif vers des villes aimentées. Tout ce monde qui se mute en urbain pour laisser grimper les feuillages sur les ruines éventuelles de nos maisons de campagne.


Si un jour vient ou la population entière se retrouve en ville, si le Québec complet habite Montréal, alors ça se noiera peut-être dans les eaux du fleuve. Sinon, mieux. Il s’en trouvera quelques uns pour oser l’expédition.. À ceux-là, il faut souhaiter une location de char, et un autoroute 40, direction est. Une sortie 166 et toujours vers le nord. Des routes sur lesquelles les fleurs auront peut-être repris le haut du pavé. À suivre les pétales. Et tenir foi en les pancartes. Et rouler toujours, jusqu’à n’en plus douter. Ste-élie de Caxton. Qu’il est bien interdit d’engager les générations futures, mais qu’il faut le promettre quand même. Il s’en trouvera encore quelques uns à garder le fort et à le parler.


À veiller sur leur galerie pour veiller sur les paroles. Toutes ces rumeurs, ces légendes, ces chansons, ces recettes de cuisine qui s’effacent à mesure que l’oralité des villages se tait.


«Ce jour là, on devra s’y plier. On comprendra peut-être la démesure territoriale que demandent les légendes pour pousser. Et tous les points perdus de nos cartographies se reconstelleront comme un ciel mystérieux sur notre terre oubliée.»

Rien de moins. La beauté est dans les yeux de celui qui regarde, dit-on.
Celui là se nomme Fred Pellerin.


Biblio: Comme une odeur de muscles, Planète rebelle 2005
Il faut prendre le taureau par les contes, Planète rebelle 2003
Dans mon village, il y a belle lurette… Planète rebelle 2001

 

L'INOPINÉE CONCEPTION

Le père Gélinas revenait de la bûche. Comme à l'annuel. II fut accueilli par des centaines de petits bras tendus. Il prit soin de les prendre deux par deux. Dans les siens. De paterner chacun. Chatouiller. Border. Puis il les endormit à la lueur d’une berceuse. Celle qu’ils savaient tous. Par cœur.
Dans la nuit de son retour, il coupa de moitié la couchette de sa femme et rêva rare. Par accotement. À cause des longs mois à ne côtoyer que des arbres. Lui qui n'était pas fait en bois. Ils firent flancs collés. De ces frôlages et caresses et tous ces fruits d'ennuyance à faire tomber du lit. Trop mûrs pour être bardassés. Ils s'emparèrent sur la pointe. En catimini. En plaisirs retenus. Pour ne pas déborder sur les chambres d’à coté. Ce fut du grand bonheur contenu. Tout en silence. De celui-là qu'une seule pincée suffit à germer du vetre au gros. D'ailleurs. Et madame renceinta de plus belle. Spontanément et à qui mieux mieux. Puis on s’encouragea par delà l'imprévu. Un petit dernier pour la chance. Ca fera un nombre pair. Un chiffre plus rond.

 

Extrait de Comme une odeur de muscles ,
Fred Pellerin, éditions Planète rebelle 2005,
150 pages. www.planeterebelle.qc.ca

 



Shows à venir


6 août 2008 20:00
L’ONIRO-LARYNGOLOGISTE,
Salle des Bizouneries Caxton St-Élie-de-Caxton, Quebec

7 août 2008 20:00
L’ONIRO-LARYNGOLOGISTE,
Salle des Bizouneries Caxton St-Élie-de-Caxton, Quebec

8 août 2008 20:00
L’ONIRO-LARYNGOLOGISTE,
Salle des Bizouneries Caxton St-Élie-de-Caxton, Quebec

9 août 2008 20:00
L’ONIRO-LARYNGOLOGISTE,
Salle des Bizouneries Caxton St-Élie-de-Caxton, Quebec



 

 


LA SECTION
«SUR LA SCÈNE»
EST PRÉSENTÉE PAR :

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RÉSEAU ADMISSION


THÉÂTRE LIONEL GROULX

 

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